Rencontre + interview avec Joséphine Viot
Brutal. est allé à la rencontre de la céramiste Joséphine Viot dans son atelier aux Lilas. Partons à la découverte de son univers à travers une interview.
Quel est ton parcours et ta formation pour arriver à la céramique ?
Études en Arts Appliquées, Bac, puis licence d'architecture, qui m'a montré que dans le volume, c'est d'avantage l'objet que l'espace qui m’intéresse. Donc BTS Design Produits. Puis une année à l'IEAC, école des Arts Ceramiques en Alsace. Parce que l'objet oui, mais surtout pas en masse. Pour trouver du sens dans la création d'objets, qui inondent déjà la planète, il faut que celui-ci soit rattaché à une personne. J'avais besoin de trouver ce sens sinon je ne sentais pas la création légitime. Pendant la formation en Design Produit j'ai effectué un stage d'un mois chez une céramiste formidable, et ça ne m'a pas lâché, plus j'en découvre, et plus j'en veux...
Es tu autodidacte ou as-tu appris de quelqu'un d'autre?
J'ai tout appris des intervenants et des professeurs de cette école, qui cherchaient autant à nous transmettre leurs techniques que leur manière d’élaborer un projet artistique.
Te souviens tu de ta première pièce ?
Surement une espèce de bol maladroit, ma maître de stage étant principalement tourneuse. Mais la première pièce marquante était celle du tout premier exercice à l'école, un pichet au colombin en grès blanc basique, préalablement dessiné avec des bandelettes de papier journal collées au hasard sur une feuille... J'ai toujours ce pichet que j'adore, il est lourd.
Comment définirais-tu ton travail ?
J'accorde autant d'importance à l'objet fini qu'à la technique, au processus, et à la matière première utilisée. Il faut que tout ça raconte la même histoire. Et je pense beaucoup à l'usage ou la place des pièces que je créees, dans notre univers, nos habitudes. Aussi pour ça, je ne travaille qu'en toute petites séries.
Au final, je crois que mes pièces sont souvent discrètes en apparence mais toujours singulières.
Quelle est ta technique favorite ? Ton moment préféré dans le processus ?
J'aime particulièrement le moment où je prépare la terre, je choisis les terres à mélanger pour leur comportement, leur poids, leur couleur, leur texture...C'est comme si je choisissais les traits de caractères du personnage que je vais modeler. Même pour une assiette...
Quel est ton matériau de prédilection ? Qu’est-ce qui te plaît chez lui ?
La porcelaine, son irrévérence. Sa souplesse et sa blancheur en font une terre aux possibilités infinies. Mais son caractère et sa mémoire la rendent capricieuse et indépendante. C'est toujours amusant de jouer avec un tel outil.
Qu'est ce qui t'inspire en dehors de la céramique ?
La lumière, la regarder, aux différentes heures de la journée, la manière dont elle donne une forme aux volumes et ses températures, qui leur donne une texture. Toute forme de parures, d'ornements, pour la recherche de signification, comment est-ce qu'on donne à voir sa personne au travers de matériaux, d'objets qu'on choisi de porter, qu'on intègre à son univers. Pour moi c'est le premier lien entre l'âme des gens et les objets qui les entourent, ça m'inspire autant pour créer de la vaisselle, que du mobilier, des sculptures.
Peux tu nous parler d'un ou de plusieurs livres sur la céramique ou sur autre chose d'ailleurs ?
Je pense à un livre, "La Consigne, les dessins des métiers d'art" éditions Ateliers d'Arts de France. J'aime beaucoup découvrir les autres langages d'une personne. La céramique des autres m'inspire moins que d'autres médiums de création. Dans ce livre, on ouvre l'univers créatif d'un artisan d'art sur un autre champ d'expression : ses recherches graphiques. Comment est-ce que ses volume dialoguent avec ses images, comment est-ce qu'il pense le volume par l'image. Je trouve ce genre de mélange particulièrement fertile.
Quels sont tes derniers voyages marquants ou tes envies de voyages ?
D'un point de vue céramique, ce fut un voyage de deux mois au Maroc, j'y ai découvert les cultures arabes, musulmanes, berbères, autrement que par de belles images instagram... et j'y reviendrai certainement. Je découvre en ce moment la culture et les territoires polynésiens, avec trop peu de céramique, mais les éléments naturels et les paysages qui font partie de tout, partout. Je vais m'attarder encore un temps ici, le Pacifique, c'est grand... Mais j'ai envie ensuite de cheminer au départ du Népal, pour rejoindre la route de la soie, et aller jusqu'en Turquie. Et découvrir, partout, comment les mains des hommes, des femmes et des enfants, fabriquent des choses, mangent, soignent...